Les dates de la corruption et du trafic d’influence : đź’¸

  1. LA CORRUPTION :

Moyen mémo-technique pour retenir la corruption et sa constitution :

Imaginez-vous un carrĂ©. Un carrĂ© a quatre cĂ´tĂ©s, deux de chaque, l’un face Ă  l’autre. Chacune ne peut exister sans l’autre. Ces quatre cĂ´tĂ©s ont une information chacun :
* Un corrupteur.
* Un corrompu.
* Un avantage indu.
* Un acte de la fonction.

Si cela vous semble flou, vous pouvez aller voir cet article qui explique la corruption.

  • LA CORRUPTION PUBLIQUE :

a. La corruption publique nationale :

L’article 179 du Code pĂ©nal1 Ă©nonce « Quiconque, pour obtenir, soit l’accomplissement ou l’abstention d’un acte, soit une des faveurs ou avantages (…), aura usĂ© de voies de fait ou menaces, de promesses, offres, dons ou prĂ©sents, ou cĂ©dĂ© Ă  des sollicitations tendant Ă  la corruption, mĂŞme s’il n’en a pas pris l’initiative, sera, que la contrainte ou la corruption ait ou non produit son effet, puni des mĂŞmes peines que celles prĂ©vues auxdits articles contre la personne corrompue Â».

Ce texte parle de « voies de fait ou de menace Â». Il y avait donc une confusion, Ă  l’époque, sur ce qu’était la corruption. La corruption est nĂ©cessairement un acte libre. Si l’avantage indu n’est pas donnĂ© librement, alors il ne s’agit pas de corruption, car il y aura de la contrainte. Ainsi, Ă  l’époque, ce qu’ils nommaient comme de la corruption n’en Ă©tait pas, si il y avait usage de voies de fait ou de menace. 

b. La corruption active publique étrangère et internationale :

La Loi du 30 juin 2000 2, modifiant le code pénal et le code de procédure pénale relative à la lutte contre la corruption, a créé le délit de corruption active publique étrangère et internationale, suite à la transposition en droit français, de deux Conventions internationales.

Cette Loi a donc créé un délit permettant de réprimer ceux qui rémunèrent un agent public pour l’accomplissement ou le non-accomplissement d’un acte de la fonction. Ce délit a été créé suite à de nombreux scandales français où de grands groupes payaient des agents publics étrangers pour obtenir des marchés publics comme Siemens ou Alstom34.  

c. La corruption passive publique étrangère et internationale :

La Loi du 13 novembre 20075, est intervenue, suite à la transposition, en droit français, de quatre Conventions internationales, dont la Convention de Merida.

Cette Loi a crĂ©Ă© le dĂ©lit de corruption passive publique Ă©trangère et internationale, permettant d’incriminer les agents publics internationaux qui acceptaient des avantages en contrepartie de l’accomplissement ou le non-accomplissement d’un acte de la fonction. 

On peut donc voir qu’il a fallu attendre 7 ans, avant de pouvoir rĂ©primer, en droit français, les agents publics Ă©trangers pour des faits de corruption. La corruption est une infraction « miroir », notamment en raison du pacte de corruption, car il y a deux personnes qui se mettent d’accord sur une action/inaction et sur un prix. Il apparait donc assez stupĂ©fiant que le reflet de l’autre ne soit incriminĂ© que 7 ans plus tard.

  • LA CORRUPTION PRIVÉE :

a. Le délit de corruption des employés des entreprises privées :

La Loi du 19 fĂ©vrier 1919 est venue complĂ©ter les dispositions des articles 177 et 179 du Code pĂ©nal de 1810. Ces articles ne prĂ©voyaient que la corruption publique et pas la corruption privĂ©e. Pour autant, ce complĂ©ment, via la Loi du 19 fĂ©vrier 1919, Ă©tait insuffisant car seuls les employĂ©s d’entreprises privĂ©es Ă©taient visĂ©s.

b. Le dĂ©lit de corruption de salariĂ© : 

La Loi du 16 dĂ©cembre 19926, dite « d’adaptation » n°92-1336 du 16 dĂ©cembre 1992 relative Ă  l’entrĂ©e en vigueur du nouveau Code pĂ©nal, a dĂ©placĂ© le dĂ©lit du code pĂ©nal au code du travail, Ă  l’article L.152-6 du Code du travail et elle a dĂ©pĂ©nalisĂ© le dĂ©lit, en diminuant le maximum de la peine d’emprisonnement de trois Ă  deux ans.  

c. Le délit de corruption privée :

L’article 2, de la Loi du 4 juillet 2005, transposant la dĂ©cision cadre du 22 juillet 2003 Ă©manant du conseil de l’Union EuropĂ©enne, est venu ajouter un chapitre V au livre IV du Code pĂ©nal de 1992 intitulĂ©e « de la corruption des personnes n’exerçant pas une fonction publique Â», permettant d’élargir la corruption privĂ©e Ă  toutes les situations, jusqu’alors non prĂ©vu par le code pĂ©nal ou le code du travail. 

Depuis 2005, nous avons les articles 445-1 et suivants du Code pĂ©nal7, relatif Ă  la corruption des personnes n’exerçant pas une fonction publique, qui permettent d’Ă©largir, lĂ  aussi, le spectre Ă  toutes les Ă©ventualitĂ©s oĂą une personne pourrait faire usage de la corruption. Par exemple, il est possible qu’un particulier fasse usage de corruption, en ce sens oĂą pour ne pas rĂ©vĂ©ler tel secret de famille ou tel adultère, il demande une contrepartie Ă  la personne possĂ©dant ce secret de famille.

Il reste, nĂ©anmoins, Ă©tonnant que ce type de corruption n’existe que depuis 17ans. La corruption publique existait bien avant la corruption privĂ©e et cette mĂŞme corruption privĂ©e ne concernait pas l’ensemble de la population. Pourquoi avoir attendu autant de temps avant d’Ă©largir le champ des possibilitĂ©s ?

  1. LE TRAFIC D’INFLUENCE :

Moyen mĂ©mo-technique pour retenir le trafic d’influence et sa constitution :

Imaginez vous un triangle. Un triangle a nĂ©cessairement trois cĂ´tĂ©s, pour chacun d’eux, il faut un Ă©lĂ©ment et pour chaque pointe du triangle, il faut Ă©galement un Ă©lĂ©ment.

Il faut donc, en tout et pour tout, six éléments :
* Celui qui donne l’avantage indu et bĂ©nĂ©ficie de la dĂ©cision favorable – Trafiqueur.
* Celui qui trafic son influence – Trafiquant.
* Celui qui prend la dĂ©cision ou qui influe sur celle-ci – AutoritĂ© publique.
* Un avantage indu.
* Une influence réelle ou supposée.
* Une décision favorable.

  • LE TRAFIC D’INFLUENCE NATIONALE :

La Loi du 4 juillet 1889 a crĂ©Ă© le trafic d’influence nationale, permettant de rĂ©primer des personnes qui trafiqueraient leur influence, suite Ă  la rĂ©ception d’un avantage, pour permettre Ă  un bĂ©nĂ©ficiaire de bĂ©nĂ©ficier d’une dĂ©cision favorable. Cette Loi fait suite Ă  des nombreux scandales politique dont le scandale des dĂ©corations oĂą « Daniel Wilson a vraisemblablement commencĂ© Ă  suggĂ©rer certaines nominations dans l’Ordre de la LĂ©gion d’honneur Ă  Jules GrĂ©vy dès les annĂ©es 1882 et 1883. Il a continuĂ© en augmentant insensiblement le nombre des heureux bĂ©nĂ©ficiaires ». Si cette histoire vous intĂ©resse, vous pourrez trouver ici : 8 de quoi Ă©pancher votre soif de savoir.

  • LE TRAFIC D’INFLUENCE PASSIF ET ACTIF D’AGENTS PUBLICS AU SEIN D’UNE ORGANISATION INTERNATIONALE PUBLIQUE :

Une Loi du 13 novembre 20079 a créé les deux articles tenant au trafic d’influence passif et actif à destination des agents publics d’une organisation internationale publique. Les articles 435-2 et 435-4 du Code pénal n’incriminaient que les agents publics au sein d’une organisation internationale publique, ce qui était très restrictif, car cela laissait également tout un pan des agents publics étrangers de côté. Cette situation accordait une certaine impunité aux agents publics étrangers ne travaillant pas pour une organisation internationale publique, comme les agents publics travaillant pour des gouvernements étrangers, les diplomates, les agents publics délivrant des permis de construire, etc. C’est pour cela que ces articles ont été modifiés par la Loi du 9 décembre 2016.

  • LE TRAFIC D’INFLUENCE PASSIF ET ACTIF Ă€ DESTINATION D’AGENTS PUBLICS ÉTRANGERS :

Le trafic d’influence passif et actif d’agent public Ă©tranger a Ă©tĂ© crĂ©Ă© via la loi du 9 dĂ©cembre 2016 dite Loi SAPIN II 10. Cette Loi a permis, en modifiant les articles susmentionnĂ©s, d’élargir la notion d’agent public Ă  tous les cas d’agents publics Ă©trangers. Elle a permis d’assurer la rĂ©pression de toutes les situations dans lesquels un agent public Ă©tranger, quel que soit sa fonction et oĂą il travaille, puisse faire l’objet de poursuites pour trafic d’influence. Cet Ă©largissement Ă©tait destinĂ© Ă  limiter les situations dans lesquels un agent public pourrait se rendre coupable de trafic d’influence, le spectre de cet article Ă©tant tellement large qu’il laisse peu de possibilitĂ© pour passer entre les mailles du filet. 

BONUS : Il n’existe pas, en droit français, de trafic d’influence privĂ©e. Le trafic d’influence privĂ© implique qu’aucune des personnes dans ce triangle ne soit un agent public. NĂ©anmoins, la Convention de l’union africaine sur la prĂ©vention et la lutte contre la corruption, Convention dite de Maputo, prĂ©voit quant Ă  elle, le trafic d’influence privĂ©.

Publié le 15 décembre 2022.

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