L’infraction de prise illégale d’intérêts ou le délit de « partialité » :

Cette infraction est souvent utilisée et notamment dernièrement puisque le ministre de la justice Eric Dupont-Moretti fait l’objet d’une enquête du chef de ce délit 1. 🧐

Légalement, cette infraction se définit comme « le fait, par une personne dépositaire de l’autorité publique ou chargée d’une mission de service public ou par une personne investie d’un mandat électif public, de prendre, recevoir ou conserver, directement ou indirectement, un intérêt de nature à compromettre son impartialité, son indépendance ou son objectivité dans une entreprise ou dans une opération dont elle a, au moment de l’acte, en tout ou partie, la charge d’assurer la surveillance, l’administration, la liquidation ou le paiement, est puni de cinq ans d’emprisonnement et d’une amende de 500 000 €, dont le montant peut être porté au double du produit tiré de l’infraction. » 2

Alors, dit comme ça, c’est compliqué à comprendre, mais plus simplement, il s’agit d’une personne qui prend, dans une opération dont il a la surveillance, un intérêt quelconque. Il s’agit donc de manquer d’objectivité dans sa profession. 

Ça ne nous avance toujours pas, non ? 🤔

Détaillons ça ! ☺️

  1. Les auteurs : Les agents publics.

Les auteurs énoncés par ce texte sont les mêmes que pour la corruption 3

  1. L’objet : L’intérêt quelconque. 
  1. L’acte : 
L’acte de la prise illégale d’intérêt.

L’acte nécessite pour sa consommation une temporalité spécifique. Il faut, comme le dit l’article 432-12 du Code pénal, que l’intérêt soit pris « dans une entreprise ou une opération dont elle a, au moment de l’acte, en tout ou partie, la charge d’assurer la surveillance, l’administration, la liquidation ou le paiement ». De plus, il s’agit d’une infraction formelle qui ne nécessite que l’accomplissement de l’acte incriminé.

Voyons quelques exemples

  • La collaboratrice d’un maire, chargée de développer les relations touristiques et économiques avec la Chine, qui élabore le contenu de marchés octroyés à une société dirigée par son époux ;
  • Deux adjoints au maire qui participent à deux délibérations du conseil municipal portant sur la modification du plan local d’urbanisme et faisant passer des terrains non constructibles dont ils sont propriétaires en zone constructible, même s’ils ne votent pas, mais restent présents dans la salle ;
  • Un vice-président de conseil général qui participe à une délibération de la commission permanente du conseil général ayant décidé d’accorder une subvention à une association qu’il avait créée et désormais dirigée par son fils ;
  • Le commissaire de police qui a conservé la maîtrise d’une opération d’expulsion forcée visant les occupants d’un immeuble dont il était devenu propriétaire ;
  • L’adjoint délégué à l’urbanisme qui a, en cette qualité, signé les avis du maire dans quatre dossiers de demande de permis de construire, alors qu’il était l’architecte auteur des projets produits à l’appui de ces demandes.

  1. L’intention : 

Cette infraction est punie d’une peine d’emprisonnement, il s’agit donc d’un délit, qui en vertu de l’article 121-3 du Code pénal, est intentionnel. Il faut donc avoir voulu prendre un intérêt dans une opération, dont on savait avoir la surveillance, l’administration, la liquidation ou le paiement. 

Alors, pas si compliqué que cela ? 🫣

Je dois quand même reconnaitre que pour une infraction qui sanctionne la partialité d’un agent public, la rédaction de celle-ci n’est pas la meilleure et serait potentiellement à revoir…

Pour autant, elle n’est pas très compliquée, une fois que l’on a compris à qui elle s’appliquait, ce que la personne fait et surtout à quoi cela touche. ☺️

Publié le 03 juillet 2022.

© Ambre Petrequin – Tous droits réservés.

Les écrits ainsi que les schémas ont été rédigés et créés par Ambre Petrequin, ils ne peuvent être repris, sous quelconque forme que ce soit, à moins de me tagger ou de me mentionner.

L’infraction générale de blanchiment 🧼💶.

Le blanchiment fait partie de ce que l’on appelle « des infractions de conséquences » c’est-à-dire qu’il faut l’exigence d’un crime ou un délit préalable, antérieurement commis. 

Le blanchiment n’est pas très compliqué à comprendre puisque l’on comprend tous que cela vient du verbe blanchir et donc rendre propre. Le blanchiment sert donc à rendre propre une chose qui était sale, en l’occurence de l’argent dans la majorité des cas. 

La définition légale du blanchiment se dédouble en deux alinéas pour englober massivement toutes les hypothèses possibles de blanchiment (Article 324-1 alinéa 1 et 2 du Code pénal).

Ainsi « le blanchiment est le fait de faciliter, par tout moyen, la justification mensongère de l’origine des biens ou des revenus de l’auteur d’un crime ou d’un délit ayant procuré à celui-ci un profit direct ou indirect.
Constitue également un blanchiment le fait d’apporter un concours à une opération de placement, de dissimulation ou de conversion du produit direct ou indirect d’un crime ou d’un délit. »1

  1. La justification mensongère de l’origine des biens ou des revenus :

Cet alinéa semble un peu barbare quand on le lit, car il n’est pas simple à comprendre, en effet, que signifie le fait « de faciliter, par tout moyen, la justification mensongère de l’origine des biens ou revenus de l’auteur d’un crime ou d’un délit ayant procuré à celui-ci un profit direct ou indirect » ? 

De manière assez simpliste, il s’agit d’aider à mentir sur l’origine des biens ou revenus d’une personne qui a commis un crime ou un délit, lui ayant procuré un profit. Même la version simplifiée semble encore un peu compliquée et si je vous montrais ? 

Il faut donc un mensonge qui porte sur les biens ou revenus et non pas sur le profit du crime ou du délit. Il faudra donc démontrer que la personne qui aide à justifier mensongèrement de l’origine d’une chose, l’a fait sur les biens et revenus et non le profit tiré du crime ou du délit. 

J’espère que vous me suivez toujours ? 🤔 Bien alors continuons…

Les biens et les revenus s’entendent dans le sens stricte du terme. Il peut donc s’agir de biens mobiliers (voiture ; montres ; garde-robe ; etc) comme immobiliers (immeuble ; maison…). Les revenus se définissent comme « ce qui est perçu, en nature ou en monnaie, par quelqu’un ou une collectivité comme fruit d’un capital placé (intérêt sur un capital prêté, dividende sur un capital engagé), ou comme la rémunération d’une activité (profit) ou d’un travail (salaire) » 2.

Bon je vais vous compliquer un peu les choses : il est possible que le menteur sur mon schéma soit la personne A, qui est l’auteur d’un crime ou d’un délit. Ce qui signifie qu’il s’agira de la même personne.

AUTO-BLANCHIMENT.

Vous trouverez la directive européenne ici : 3

La jurisprudence de la Cour de cassation a, d’abord, énoncé cette possibilité pour l’alinéa 2, puis pour l’alinéa 1 : 

  • Cour de Cassation, Crim, 14 janv 2004, n°04-81165 4 : « Les dispositions de l’article 324-1 alinéa 2 C.pén est applicable à l’auteur du blanchiment du produit d’une infraction qu’il a lui-même commise ».
  • Cass, Crim, 20 fev 2008, n°07-82977 5 : « L’article 324-1 C.pén est applicable à l’auteur du blanchiment du produit d’une infraction qu’il a lui-même commise »

La différence entre ces deux décisions est que dans la deuxième, la chambre Criminelle n’a pas mentionné un alinéa en particulier, mais l’article dans son ensemble. Il fallait donc l’entendre comme le fait que cela était applicable aussi bien à l’alinéa 2 du blanchiment, mais également à son alinéa 1. 

Par la suite de nombreuses autres décisions ont été rendues telle que l’arrêt de la Cour de cassation, Crim, 7 décembre 2016 n°15-87.335 6 : L’arrêt a été censuré pour ne pas avoir retenu des faits constitutifs de blanchiment distincts des versements pour lesquels le prévenu avait été déclaré coupable d’abus de biens sociaux.

Prenons donc l’arrêt de 2016 susmentionné et schématisons le pour comprendre : 
« M. Armen Y…, représentant légal de la société Domaine des Broix, a été poursuivi du chef d’abus de biens sociaux pour avoir fait verser, par cette société, la somme 2 008 990, 17 euros à la société Capfin investissement Ltd, à titre de commissions correspondant à des prestations fictives ; qu’il est également poursuivi du chef de blanchiment pour avoir fait apparaître ces sommes comme étant des commissions ».

Crim, 7 décembre 2016 n°15-87.335

L’infraction d’abus de biens sociaux sera traitée dans un autre article très prochainement. Il vous sera donc possible de vous y référer pour comprendre cette partie là du schéma. ☺️

2. Le placement, la conversion et la dissimulation : 

Je pense qu’il s’agit ici de l’alinéa le plus simple, quand bien même, on ne comprend pas nécessairement ce qu’est le placement, la conversion ou la dissimulation. En effet, il s’agit ici d’aider à une opération de placement, de conversion ou de dissimulation du produit de l’infraction c’est-à-dire du crime ou du délit. 

Commençons par le plus basic : 

Il convient de rappeler qu’il est aussi possible d’avoir le même auteur de blanchiment et du crime ou délit, tout comme il est possible que ce ne soit pas le même individu.

Pas la même personne.
La même personne

Ensuite, je me dois de vous expliquer certains termes, notamment le placement, la conversion et la dissimulation :

Opération de placement.

Opération de conversion.

Opération de dissimulation.

Prenons un exemple regroupant ces trois termes et voyons où se trouve l’opération de placement, de conversion et dissimulation. Pour le cas d’espèce, c’est un homme qui vend de la drogue et qui récupère de l’espèce. Cette espèce est placée sur le compte de sa femme, qui va, avec ces sommes, acheter une moto. 

Exemple susmentionné.

En ce qu’il est du produit de l’infraction, celui-ci est considéré comme le profit réalisé, grâce à l’infraction c-à-d par le crime ou le délit. Généralement, le produit de l’infraction sera souvent de l’argent, en espèces notamment, mais il peut s’agir d’autres choses, comme des titres ou des pièces à conviction. 
Ce produit de l’infraction peut-être direct ou indirect, en conséquence, il peut s’agir de l’argent obtenu de la revente d’un scooter volé, pour le caractère indirect.

Nous avons vu ici l’infraction générale de blanchiment, mais il existait bien avant celle-ci, des infractions spéciales de blanchiment pour le proxénétisme 1, le trafic de stupéfiants 2 ou encore le terrorisme 3.

Si vous avez réussi à me suivre jusque là, je vous félicite 👏🏼 et je vous remercie, car cela signifie que j’ai réussi à rendre limpide une infraction qui peut être problématique en général, et surtout lors d’un cas pratique pour les personnes en droit, cette infraction se confondant souvent avec l’infraction principale commise.

Si on arrive à la distinguer du reste des infractions lors de la lecture d’un arrêt ou d’un cas pratique, il sera plus simple d’identifier si il faut appliquer l’alinéa 1, ou 2, ou les infractions « spéciales » de blanchiment.

Publié le 12 juin 2022.

© Ambre Petrequin – Tous droits réservés.

Les écrits ainsi que les schémas ont été rédigés et créés par Ambre Petrequin, ils ne peuvent être repris, sous quelconque forme que ce soit, à moins de me tagger ou de me mentionner.

Qu’est ce qu’est la corruption ?

Beaucoup de gens pensent savoir ce qu’est la corruption, mais ne peuvent pas généralement bien le décrire ou l’expliquer, c’est pour ca que je suis là. Je vais vous expliquer clairement et simplement ce qu’est la corruption. 

La corruption est une infraction de droit des affaires, utilisée pour obtenir une contrepartie permettant de developper son affaire. 

J’admets dit comme ça, on y comprend toujours pas grand chose. En réalité, ce n’est pas si compliqué que ça et les quatre éléments à retenir pour la corruption c’est :

  • Un corrupteur ;
  • Un corrompu ;
  • Un acte de la fonction ;
  • Un avantage indu.
Schéma de l’infraction de corruption.

Si vous avez ces quatre éléments, alors c’est de la corruption. Seulement, il y’a plusieurs types de corruption :

  • Active ;
  • Passive ;
  • Publique ;
  • Privée. 

Ces types de corruption peuvent se mélanger, vous pouvez avoir de la corruption active publique, de la corruption active privée, de la corruption passive privée et de la corruption passive publique. Jusque là, on est bon. Tous ces textes se trouvent dans le code pénal. 

EXEMPLE ARTICLE 433-1 ALINÉA 1, 1° CODE PÉNAL :

Prenons comme exemple l’article 433-1  alinéa 1, 1° du Code pénal ci-dessous : « Est puni de dix ans d’emprisonnement et d’une amende de 1 000 000 €, dont le montant peut être porté au double du produit tiré de l’infraction, le fait, par quiconque, de proposer sans droit, à tout moment, directement ou indirectement, des offres, des promesses, des dons, des présents ou des avantages quelconques à une personne dépositaire de l’autorité publique, chargée d’une mission de service public ou investie d’un mandat électif public, pour elle-même ou pour autrui :
1° Soit pour qu’elle accomplisse ou s’abstienne d’accomplir, ou parce qu’elle a accompli ou s’est abstenue d’accomplir, un acte de sa fonction, de sa mission ou de son mandat, ou facilité par sa fonction, sa mission ou son mandat »

Commençons par reconnaitre d’abord les quatre éléments

  • Un corrupteur : Celui qui propose.
  • Un corrompu : Une personne dépositaire de l’autorité publique, chargée d’une mission de service public ou investie d’un mandat électif public.
  • Un acte de la fonction : « Soit pour qu’elle accomplisse ou s’abstienne d’accomplir, ou parce qu’elle a accompli ou s’est abstenue d’accomplir, un acte de sa fonction, de sa mission ou de son mandat, ou facilité par sa fonction, sa mission ou son mandat ».
  • Un avantage indu : des offres, des promesses, des dons, des présents ou des avantages quelconques.
Exemple de corruption active d’agent public.

Ici, il s’agit d’une infraction de corruption active puisque l’on retrouve les mots : « proposer, cèder, octroyer ». A contrario, les mots « solliciter, agréer, recevoir » qui démontre une infraction de corruption passive. 

Bon jusque là, tout le monde m’a suivi ? 🤔 Okay, alors on continue. 

Je vais complexifier l’affaire en vous disant que cette infraction est une infraction miroir 🪞. Si vous retenez ça, que ce soit dans les cas pratiques ou dans la vie en général, vous vous en sortirez. En effet, la corruption ne peut pas être qualifiée à l’égard d’un seul individu : la corruption active va avec la corruption passive, l’une étant le reflet de l’autre. 

Infraction miroir.

Certains termes peuvent encore vous paraitre flou, comme par exemple les « offres, des promesses, des dons, des présents ou des avantages quelconques », nous allons donc les étudier :

Après ces quelques explications, j’espère sincèrement que vous commencez à comprendre ce qu’est la corruption et qu’elle n’est pas si complexe que cela, finalement.

Continuons sur notre lancée, avec les termes : « sans droit, à tout moment, directement ou indirectement« .

  • Les termes « à tout moment » signifient que l’avantage indu peut-être donné postérieurement ou antérieurement l’acte de la fonction.
  • Ensuite, les termes « sans droit » signifient qu’il n’y a aucun droit qui justifie l’octroie de cet avantage indu (ci-dessus), a contrario, une politique cadeau, dans le cadre de relation commerciale pour fidéliser les clients, est « un droit ».
  • Enfin, les termes « directement ou indirectement » permettent d’élargir la corruption à toutes les hypothèses où une personne A, donnerait à B l’avantage indu pour qu’il le verse à C, d’où le terme « indirectement ».

S’agissant des agents publics 👩🏼‍✈️, voici un tableau d’exemples correspondant aux trois types d’agents mentionnés par le texte : « personne dépositaire de l’autorité publique, chargée d’une mission de service public ou investie d’un mandat électif public ».

CONCLUSION :

L’exemple que j’ai pris était de la corruption d’agent public français, mais il existe également de la corruption d’agent public étranger (voir la CJIP Airbus) ; de la corruption privée, avec des particuliers, qui s’applique aux sociétés c’est-à-dire aux personnes qui dans une société corrompent une personne d’une autre société. Là également la distinction active/passive s’applique.

Il faudra donc se référer au bon texte, si vous avez un agent public, il faut se demander s’il est français ou étranger et appliquer le texte en conséquence, si c’est entre sociétés ou avec deux particuliers, il ne faudra pas appliquer les textes relatifs aux agents publics, mais ceux aux particuliers. 
Si vous avez un particulier/un salarié d’une société qui pour obtenir un marché public, corrompt un agent public, alors il faudra appliquer les textes en matière d’atteinte à la probité des agents publics.

Publié le 29 mai 2022.

© Ambre Petrequin – Tous droits réservés.

Les écrits ainsi que les schémas ont été rédigés et créés par Ambre Petrequin, ils ne peuvent être repris, sous quelconque forme que ce soit, à moins de me tagger ou de me mentionner.

Bienvenue 👋🏼

Bonjour à tous, 

Avant toute chose, je me surnomme Ambrouille et je suis diplômée d’un master 1 en Droit pénal et Sciences criminelles, ainsi que du DU Compliance Officer et sécurité financière spécialisation juriste anticorruption antiblanchiment (avec mention). 

Le droit pénal des affaires a toujours été l’une de mes matières favorites et si on l’allie à la compliance, on peut trouver aussi bien le volet répressif que préventif. Ces deux volets sont d’une importance cruciale puisque l’un ne peut évoluer sans l’autre. 

D’où l’idée de ce site, je vous présenterai de manière claire et précise aussi bien des notions de droit, que des faits d’actualité. Je ferai en sorte de rendre toutes ces notions un peu complexe voir rébarbative, amusante et simple à se remémorer. J’ai toujours cru que l’ancienne manière d’inculquer des notions était de donner un cours bien lourd, bien dense et surtout barbant et j’ai toujours voulu changer cela. Pourquoi devrions-nous passer des heures à apprendre des notions que l’on ne comprend pas quand on peut les simplifier pour qu’elles soient plus accessibles ? 

Si pour des élèves en droit, des professeurs, des professionnels du droit, certaines notions sont floues ou ont pu l’être, je m’engage à changer cela, dans mon domaine. D’autant que, le volet préventif est encore méconnu pour beaucoup que ce soit des étudiants en droit que des personnes lambdas, alors pourquoi pas montrer au monde ce qu’il est possible de faire avec les bons outils, pour prévenir un risque en droit pénal des affaires ?